Arcachon… A l’évocation de son nom, ce sont les vacances qui viennent à l’esprit, la mer, le bon air, et ce n’est pas un hasard puisque dès ses premiers habitants, voilà presque deux siècles, la ville n’a cessé de miser sur les atouts naturels du lieu pour développer ce que l’on peut appeler un tourisme de santé.
Ses quartiers en portent le souvenir, Ville d’Eté, où les Bordelais aisés venaient profiter des bienfaits des bains de mer pour leur santé, Ville d’Hiver dont les pins et l’air iodé convenaient parfaitement aux maladies pulmonaires. Les quatre saisons trouvèrent ainsi leur public, venu de tous bords en villégiature.
Les villas arcachonnaises de la seconde moitié du XIXe siècle sont aussi diverses que la population était cosmopolite. Les styles se mélangent harmonieusement, mauresque, colonial, néo-gothique, chalet suisse, et autres influences chères à cette époque. On venait de loin résider ici pour une saison ou plus et l’on côtoyait aussi bien la bonne société bordelaise que celle de Paris ou de grandes villes françaises, mais également européennes, russes et même américaines.
Sur le plan architectural, les nombreux décrochements des constructions, les tourelles, les modénatures variées, les balcons, lambrequins et autres boiseries, suffisaient largement à la décoration de ces demeures sans qu’il fût besoin d’en rajouter. Les ornements en céramique polychrome semblent être arrivés, comme ailleurs, aux alentours de 1900, voire même très récemment. On les rencontre sur les parties ajoutées à ces constructions plus anciennes, sur un oriel, une porte, un balcon ou une extension, les propriétaires ayant sans nul doute été influencés par les nouvelles constructions où les céramiques à la mode Belle époque s’exposaient en bonne place, tout particulièrement pour faire connaitre le nom de la demeure.
Ces appellations racontent manifestement un pan de l’histoire de ceux qui les ont choisies, ou ce qui les touchait. Ce pouvait être au travers du théâtre ou de la littérature, telle Tyltyl-Mytyl, frère et sœur de conte, ou bien évoquer leur région d’origine ou de cœur, telles Clenstrae ou Franche-Comté. La nature a toujours été source d’inspiration avec une préférence pour la flore mais aussi la mer si proche avec ses Embruns ou ses Haliotides. Les prénoms sont aussi bien présents sans qu’il soit aisé de savoir si l’on honore un proche ou une œuvre réputée à cette époque, à moins que l’on recherche plutôt la protection divine d’un saint. Béatrix évoque une bienheureuse femme mais aussi une œuvre de Balzac et même un astéroïde ; Saint Séverin peut faire référence à la commune charentaise comme à l’abbé béatifié. Seuls les passionnés d’histoire locale sont susceptibles de retrouver la signification d’origine.
De nombreux carreaux de faïence, de rosaces et cabochons, proviennent de la Faïencerie d’Hippolyte Boulenger & Cie à Choisy-le-Roi près de Paris, qui avait une maison de vente Cours d’Alsace Lorraine à Bordeaux. Parfois, cette provenance est repérable écrite en toutes lettres, comme sur le panneau publicitaire de la marque Félix Potin. Mais l’on retrouve aussi des productions d’autres faïenceries ou tuileries connues, notamment celles de Sarreguemines, Creil Montereau, Minton, Gilardoni et Muller. Les grès émaillés de Gentil & Bourdet et de Fourmaintraux Delassus à Desvres sont également repérables.
Parallèlement à des décors plus que centenaires, on notera quelques mosaïques, représentatives de la période hygiéniste, thermes et bains-douches, telles celles de la source Sainte Anne des Abatilles agréée en 1925.
Dans ce même quartier, le fronton de l’église Saint Louis est orné d’une représentation de Louis IX, réalisée sur carreaux de grès d’après une enluminure du XIIIe siècle. Cette représentation datée de 1998 montre la place qu’a encore de nos jours la céramique architecturale dans le domaine de la création comme de la rénovation.
Il n’est d’ailleurs pas exclu qu’exceptionnellement, des décors présents au catalogue des céramistes ayant produit des ornements vers 1900, et identifiés comme tels, aient fait l’objet d’une réplique à l’identique.
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Mai 2014