A côté de la flore, omniprésente dans les catalogues de fabricants de céramique architecturale du début du XXe siècle, la gent animale se distingue par sa rareté. Une forme découpée identifiable à distance pour les uns, de belles couleurs pour les autres, les oiseaux sont de loin les seuls animaux pouvant rivaliser avec les fleurs et s’exposer sur nos toits et nos murs.
L’oiseau est le seul animal à être perché au sommet des épis de faîtage, place que lui conteste à peine quelque animal fabuleux rescapé d’un lointain passé. L’inspiration était facile à trouver puisque chaque céramiste selon sa région pouvait observer la cigogne, le pigeon ou le goéland, plumes au vent, posé sur la cheminée ou le faîte du toit.
Le choix de l’oiseau que l’on voulait voir orner sa maison était guidé par l’aspect esthétique, par la connaissance que l’on avait de lui, de son origine géographique et de ses mœurs ayant donné matière à des valeurs symboliques, parfois diverses et même contradictoires.
Par leur forme élancée et leur goût naturel pour le perchoir élevé, les échassiers sont particulièrement bien adaptés pour figurer en épis de faîtages, mais on peut aussi les repérer ailleurs. Hérons, flamants roses et cigognes sont représentés debout, avec parfois le poisson qu’ils viennent de pêcher, ou en pleine action, lorsque la taille du panneau le permet.
Les citadins découvrant les côtes de l’ouest de la France ne peuvent ignorer les cris des mouettes et des goélands. Ces oiseaux maritimes ornent plutôt les murs de ces régions, mais peuvent également rappeler ailleurs la région d’origine du propriétaire, comme c’est aussi le cas des cigognes pour les Alsaciens expatriés.
D’autres oiseaux sont choisis pour leur symbolisme, ou le lien qu’ils ont tissé avec l’homme. Colombe blanche et pigeons voyageurs sont des messagers, telle celle qui apporta, dit-on, un rameau d’olivier à Noé, signe de vie et de paix, ou ceux que l’on utilisait pour transporter les messages lors du premier conflit mondial du XXe siècle.
Le coq est bien connu pour annoncer le lever du soleil, avec lequel il est souvent représenté. La forme et la couleur de son plumage en font un oiseau artistiquement intéressant. Ses mœurs le placent en animal qui sait défendre son territoire, en étant parfois même agressif. Son étymologie latine, gallus, coq mais aussi Gaulois, associée à sa fierté et à son courage l’ont imposé dès l’origine de la République française comme l’un de ses emblèmes.
Autre oiseau solaire : le paon. Sa façon de faire la roue ou se percher en exposant son plumage coloré en fait un sujet attirant pour le décorateur. La perte annuelle de ses plumes caudales et la nouvelle repousse sont un symbole de renouveau qui prévaut heureusement sur sa réputation d’animal orgueilleux.
Les passereaux figurent aussi au bestiaire du céramiste, pour leurs couleurs ou ce que l’animal nous évoque, telle l’hirondelle qui nous rappelle le rythme immuable des saisons, par son départ automnal pour hiverner et son retour chaque printemps. Les céramistes s’accordent parfois quelques libertés avec les couleurs des petits oiseaux, si bien qu’il n’est pas toujours aisé de les nommer.
La blancheur évoque la pureté, telle celle du cygne majestueux et celle de tout oiseau blanc ; tandis que d’autres espèces plaisent au contraire pour la chaleur leur coloris chatoyants. L’on retrouve dans cette catégorie les perroquets, faisans, martins pêcheurs… et autres volatiles.
Le choix du rapace ou du corbeau est particulier car hiboux nocturnes et vautours charognards n’ont pas forcément une connotation positive. Gageons qu’il faille retenir le côté sage et méditatif du hibou, celui qui voit même dans les ténèbres, symbole de la connaissance et du savoir. Quant au vautour, c’est sans doute son habitude de surplomber son territoire qui lui vaut sa place en épi de faîtage. Mais le corbeau…